La Cour divisionnaire conclut que les employeurs peuvent exiger un examen médical indépendant dans « certains cas »

Les lecteurs d’Au Point connaissent bien les dimensions procédurales et substantielles de l’obligation d’accommoder les besoins d’un employé relatifs à un handicap. D’une part, l’obligation procédurale oblige l’employeur à évaluer les besoins de l’employé et à enquêter sur les mesures d’accommodement possibles pour cet employé. D’autre part, l’obligation substantielle oblige l’employeur à fournir les accommodements nécessaires sauf en cas de contrainte excessive. Mais dans quelle mesure l’employeur doit-il accepter la preuve médicale présentée au nom de l’employé? Et dans quels cas l’employeur a-t-il le droit de solliciter des renseignements médicaux supplémentaires? La Cour divisionnaire s’est récemment penchée sur ces questions dans Bottiglia c. Ottawa Catholic School Board (mai 2017).

Pour situer les choses dans leur contexte, mentionnons que M. Bottiglia, surintendant auprès du Ottawa Catholic School Board (« Conseil scolaire ») était absent du travail depuis deux ans par suite d’une dépression provoquée par un conflit en milieu de travail. En juin 2012, son médecin a informé le Conseil scolaire que l’état de M. Bottiglia résistait aux traitements et que M. Bottiglia aurait besoin d’un congé prolongé. À peine quelques mois plus tard, alors que le congé de maladie de l’employé allait se terminer, le médecin a donné un avis beaucoup moins réservé sur l’aptitude de l’employé à reprendre le travail. Il a proposé un retour graduel au travail en commençant par seulement quatre heures par jour, deux jours par semaine, la reprise complète du travail devant s’échelonner sur une période allant de 6 à 12 mois.

Compte tenu de l’incertitude du pronostic de l’employé et de la très longue période proposée de retour au travail, et n’étant pas certain que le médecin traitant comprenait bien la nature du milieu de travail et des fonctions de l’employé, le Conseil scolaire a informé l’employé qu’il lui demandait de subir un examen médical indépendant (« EMI »). L’employé a initialement accepté de subir l’EMI, pour ensuite refuser au motif que le Conseil scolaire avait indûment influencé le processus en fournissant au médecin indépendant des informations contextuelles concernant les circonstances ayant mené à son congé de maladie et la demande de retour au travail. Selon l’employé, cette information compromettait l’objectivité de l’examinateur indépendant. Il a ensuite déposé auprès du Tribunal des droits de la personne de l’Ontario une requête alléguant la discrimination fondée sur un handicap.

Le Tribunal a rejeté la requête, concluant qu’il était raisonnable dans les circonstances pour le Conseil scolaire de demander un EMI et que ce dernier avait donc tenté de se conformer à son obligation procédurale d’accommodement. Le Tribunal était d’avis que les questions du Conseil scolaire concernant la fiabilité et l’exactitude de l’avis du médecin étaient raisonnables et justifiaient la demande pour un deuxième avis. Le Tribunal a également conclu que le Conseil scolaire n’avait pas eu tort de fournir des renseignements à l’examinateur indépendant et que c’était M. Bottiglia lui-même qui avait mis fin au processus d’accommodement en ne se présentant pas à son EMI. La décision du Tribunal a été confirmée à la suite d’une demande de réexamen. M. Bottiglia a sollicité auprès de la Cour divisionnaire le contrôle judiciaire de la décision du Tribunal.

La Cour divisionnaire a rejeté la requête en contrôle judiciaire de l’employé, concluant que la décision du Tribunal était raisonnable. La Cour divisionnaire a indiqué clairement que les employeurs n’ont pas le droit absolu d’obliger un employé à subir un EMI, mais qu’il est justifié dans certains cas de demander un deuxième avis. L’un de ces cas est celui où [TRADUCTION] « l’employeur a des motifs raisonnables et véritables de douter de l’adéquation et de la fiabilité des renseignements fournis par l’expert médical de son employé ». La Cour divisionnaire a ajouté que l’employeur n’a pas le droit de solliciter un EMI pour simplement remettre en cause l’avis de l’expert médical de l’employé. L’employeur a plutôt le droit de solliciter un deuxième avis lorsqu’il ne peut pas raisonnablement s’attendre à obtenir auprès du médecin de l’employé les renseignements dont il a besoin pour exécuter son obligation procédurale d’accommodement.

Sur la question de savoir si le refus de M. Bottiglia de subir un EMI était justifié, la Cour divisionnaire a appliqué la norme de contrôle du caractère raisonnable et a estimé que la conclusion du Tribunal sur cette question faisait partie des issues possibles et acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit et n’avait donc pas à être modifiée. La requête en contrôle judiciaire de M. Bottiglia a été rejetée et celui-ci a été condamné à payer 30 000 $ en dépens au Conseil scolaire.

 

À notre avis

Le Conseil scolaire était représenté par Me Paul Marshall et Me Raquel Chisholm d’Emond Harnden. À tous les stades de l’instance, ils ont été en mesure de démontrer que les efforts du Conseil scolaire pour respecter l’obligation procédurale d’accommodement ont été faits de bonne foi et que la demande d’EMI était justifiée dans les circonstances. Cette décision est très positive pour les employeurs et fournit des renseignements utiles sur l’obligation procédurale d’accommodement et, notamment, sur les cas où une demande d’EMI est appropriée.

Si vous voulez davantage d’information, veuillez communiquer avec Paul Marshall au 613‑940‑2754.

Related Articles

La CSPAAT impose désormais un délai de 3 jours ouvrables pour la déclaration initiale d’un accident par les employeurs

Le 29 septembre 2023, la Commission de la sécurité professionnelle et de l’assurance contre les accidents du travail (« CSPAAT ») a…

Le gouvernement de l’Ontario propose d’importantes modifications à diverses lois dans le secteur de l’éducation

En avril, le gouvernement de l’Ontario a déposé le projet de loi 98, Loi de 2023 sur l’amélioration des écoles et…

La Cour supérieure de justice de l’Ontario déclare la Loi 124 nulle et sans effet

Le 29 novembre 2022, la Cour supérieure de justice de l’Ontario a publié une décision très attendue sur dix demandes…