Projet de loi 160 – L’Ontario entreprend la réforme du régime de santé et sécurité au travail

Le ministre du Travail de l’Ontario (le « Ministre Â») a rĂ©cemment dĂ©posĂ© le projet de loi 160, Loi modifiant la Loi sur la santĂ© et la sĂ©curitĂ© au travail et la Loi de 1997 sur la sĂ©curitĂ© professionnelle et l’assurance contre les accidents du travail en ce qui concerne la santĂ© et la sĂ©curitĂ© au travail et d’autres questions. Le projet de loi 160 a reçu la Sanction royale le 1er juin 2011. Le projet de loi 160 applique bon nombre des recommandations soumises par le rapport du Conseil consultatif d’experts de la santĂ© et de la sĂ©curitĂ© au travail (le « Rapport Dean Â»). Le Conseil a Ă©tĂ© constituĂ© Ă  la suite d’un accident survenu en 2009, oĂą quatre travailleurs de la construction de Toronto ont Ă©tĂ© tuĂ©s lorsque l’échafaudage suspendu sur lequel ils travaillaient s’est effondrĂ©. Le Ministre a chargĂ© le Conseil d’effectuer un examen global du rĂ©gime de santĂ© et de sĂ©curitĂ© au travail de l’Ontario. Le Rapport Dean contient 46 changements proposĂ©s Ă  la façon dont l’Ontario rĂ©glemente la santĂ© et la sĂ©curitĂ© au travail.

Le projet de loi 160 applique bon nombre de ces changements et modifie considĂ©rablement le rĂ©gime de santĂ© et sĂ©curitĂ© au travail en Ontario. On retrouve parmi les modifications le nouveau pouvoir confĂ©rĂ© au Ministre de nommer un directeur gĂ©nĂ©ral de la prĂ©vention. Le directeur gĂ©nĂ©ral de la prĂ©vention sera chargĂ© de conseiller le Ministre Ă  l’égard de la santĂ© et la sĂ©curitĂ© au travail et Ă©tablira et approuvera des normes et des fournisseurs de formation. Le projet de loi 160 prĂ©voit aussi l’élargissement des pouvoirs des coprĂ©sidents des ComitĂ©s mixtes sur la santĂ© et la sĂ©curitĂ© au travail (« CMSST Â») de mĂŞme que de la formation supplĂ©mentaire pour les dĂ©lĂ©guĂ©s Ă  la santĂ© et Ă  la sĂ©curitĂ©.

ÉTABLISSEMENT DE NORMES DE FORMATION

Pour les employeurs, le changement le plus important prĂ©vu par le projet de loi 160 a peut-ĂŞtre trait aux nouvelles normes applicables aux programmes de formation en santĂ© et en sĂ©curitĂ© obligatoires en vertu de la Loi sur la santĂ© et la sĂ©curitĂ© au travail (la « LSST Â»). Le projet de loi 160 prĂ©voit que le directeur gĂ©nĂ©ral de la prĂ©vention (le « DGP Â») a le pouvoir d’établir des normes applicables aux programmes de formation visĂ©s par la LSST et d’approuver les programmes de formation qui respectent ces normes. Le DGP est aussi autorisĂ© Ă  Ă©tablir des normes applicables aux fournisseurs de programmes de formation et Ă  approuver les fournisseurs qui respectent ces normes.

Le pouvoir d’établir des normes relatives aux programmes de formation en santé et en sécurité permet au DGP d’adopter bon nombre des changements recommandés dans le Rapport Dean, notamment la formation obligatoire en sécurité et en sensibilisation pour les employés de premier niveau et les superviseurs de première ligne de même que la formation obligatoire en sécurité pour les secteurs à haut risque, notamment la construction. Ces normes seront publiées et seront susceptibles de modifications par le DGP.

ÉLARGISSEMENT DES POUVOIRS DES COPRÉSIDENTS DU CMSST DE FAIRE DES RECOMMANDATIONS

Ă€ l’heure actuelle, en vertu de la LSST, le CMSST peut faire des recommandations Ă  l’employeur, ou Ă  l’entrepreneur, en vue de l’amĂ©lioration de la sĂ©curitĂ© des travailleurs. Le projet de loi 160 prĂ©voit l’élargissement de ce pouvoir en donnant au coprĂ©sident reprĂ©sentant les travailleurs et au coprĂ©sident reprĂ©sentant l’employeur au CMSST la capacitĂ© de faire des recommandations Ă  l’employeur, ou Ă  l’entrepreneur, mĂŞme lorsque le ComitĂ© en est Ă  une impasse sur la recommandation particulière. Ce changement est important puisque la prĂ©sentation de la recommandation, mĂŞme en l’absence de consensus, dĂ©clenchera l’application de l’obligation par l’employeur de rĂ©pondre Ă  la recommandation dans les 21 jours.

FORMATION SUPPLÉMENTAIRE POUR LES DÉLÉGUÉS À LA SANTÉ ET À LA SÉCURITÉ

En vertu du projet de loi 160, les employeurs doivent veiller Ă  ce que les dĂ©lĂ©guĂ©s Ă  la santĂ© et Ă  la sĂ©curitĂ© (« DSS Â») reçoivent la formation nĂ©cessaire pour exercer efficacement leurs pouvoirs et leurs fonctions. Ă€ l’heure actuelle, seuls un membre reprĂ©sentant les travailleurs et un membre reprĂ©sentant l’employeur au CMSST doivent ĂŞtre agréés par la CSPAAT. Le projet de loi 160 fournit au DGP le pouvoir d’établir les normes de formation pour les DSS et d’agrĂ©er les personnes qui rĂ©pondent aux critères. Les particuliers qui sont actuellement visĂ©s par un agrĂ©ment en vertu de la Loi de 1997 sur la sĂ©curitĂ© professionnelle et l’assurance contre les accidents du travail (« LSPAAT Â») sont rĂ©putĂ©s avoir Ă©tĂ© agréés en vertu des modifications.

CONSEIL DE LA PRÉVENTION, DIRECTEUR GÉNÉRAL DE LA PRÉVENTION ET ENTITÉS DÉSIGNÉES

Le projet de loi 160 confère au Ministre le pouvoir d’établir un Conseil de la prĂ©vention (le « Conseil Â»). Le Conseil a comme fonctions de conseiller le Ministre relativement Ă  la nomination du DGP et de conseiller le DGP sur les questions relatives Ă  la prĂ©vention des blessures au travail, Ă  une stratĂ©gie provinciale de santĂ© et sĂ©curitĂ© au travail et aux changements apportĂ©s au financement et Ă  la prestation des services de santĂ© et sĂ©curitĂ© au travail. Le Ministre nommera membres du Conseil des reprĂ©sentants des groupes suivants :

1. Les syndicats et organisations syndicales et provinciales.
2. Les employeurs.
3. Les travailleurs non syndiqués, la CSPAAT et d’autres personnes ayant de
    l’expertise en santĂ© et sĂ©curitĂ© au travail.

Lorsqu’il nomme les membres du Conseil, le Ministre est tenu de veiller Ă  ce qu’il y ait reprĂ©sentation Ă©gale entre les groupes dĂ©crits en 1 et 2 ci?dessus et que les membres du groupe 3 ne constituent pas plus du tiers du Conseil.

Le DGP, qui sera nommé jusqu’à concurrence de cinq ans par le Ministre (sur avis du Conseil), travaillera avec le Conseil pour élaborer une stratégie provinciale en santé et sécurité au travail. Le DGP sera aussi tenu de préparer un rapport annuel sur la santé et sécurité au travail et d’informer le Ministre sur des questions relatives à la prévention des blessures au travail. Le DGP conseillera aussi le Ministre sur toute modification proposée au financement et à la prestation de services pour la prévention des blessures au travail et des maladies professionnelles. L’établissement du Conseil et la nomination du DGP font essentiellement passer la responsabilité afférente à la prévention des blessures au travail de la CSPAAT au Conseil et au DGP.

En vertu des modifications apportées par le projet de loi 160, le Ministre bénéficie aussi du pouvoir d’établir des normes qu’une entité doit respecter afin d’être désignée comme association pour la sécurité au travail ou comme clinique médicale ou centre de formation spécialisé dans la santé et la sécurité au travail. De telles entités désignées seront admissibles à des subventions du Ministère. Les entités déjà désignées en vertu de la LSPAAT sont réputées désignées en vertu du projet de loi 160. Le DGP est chargé de surveiller les entités désignées et d’informer le Ministre de leur conformité aux normes établies.

LES INSPECTEURS PEUVENT RÉFÉRER LES PLAINTES DE REPRÉSAILLES À LA COMMISSION DES RELATIONS DE TRAVAIL DE L’ONTARIO

Un autre changement important a trait au pouvoir des inspecteurs du Ministère de rĂ©fĂ©rer une plainte de reprĂ©sailles Ă  la Commission des relations de travail de l’Ontario (la « CRTO Â»). Actuellement, en vertu de l’article 50 de la LSST, il est interdit aux employeurs d’exercer des reprĂ©sailles contre un employĂ© pour s’être conformĂ© Ă  la LSST. Lorsqu’un travailleur se plaint de reprĂ©sailles, l’affaire peut ĂŞtre rĂ©glĂ©e par arbitrage dĂ©finitif et contraignant en vertu d’une convention collective, s’il y a lieu, ou par le dĂ©pĂ´t d’une plainte auprès de la CRTO. Suivant les modifications prĂ©vues par le projet de loi 160, les inspecteurs du Ministère pourront rĂ©fĂ©rer une plainte de reprĂ©sailles Ă  la CRTO, dans la mesure oĂą l’employĂ© y consent et que la question n’a pas dĂ©jĂ  Ă©tĂ© rĂ©glĂ©e au moyen d’un arbitrage dĂ©finitif et contraignant. Cette modification s’accompagne d’autres changements procĂ©duraux, comme la possibilitĂ© pour la CRTO d’accĂ©lĂ©rer l’instance, afin de faciliter le dĂ©pĂ´t de plaintes de reprĂ©sailles.

ENTRÉE EN VIGUEUR DU PROJET DE LOI 160

Les dispositions du projet de loi 160 relatives aux exigences de formation supplĂ©mentaire pour les DSS ainsi qu’au pouvoir des inspecteurs du Ministère de rĂ©fĂ©rer des plaintes de reprĂ©sailles Ă  la CRTO entreront en vigueur Ă  la date de leur proclamation par le lieutenant gouverneur. Les modifications prĂ©vues par le projet de loi 160 qui ont trait Ă  l’agrĂ©ment des membres d’un CMSST, Ă  l’élargissement des pouvoirs du CMSST et Ă  la dĂ©signation comme association pour la sĂ©curitĂ© au travail entreront en vigueur Ă  la date la plus rapprochĂ©e entre le 1er avril 2012 et la date Ă  dĂ©terminer par le lieutenant gouverneur. Les autres dispositions du projet de loi 160, y compris les dispositions qui ont trait au DGP et au Conseil, sont entrĂ©es en vigueur le 1er juin 2011.

Ă€ notre avis

MĂŞme si le projet de loi 160 contient la plupart des modifications lĂ©gislatives nĂ©cessaires pour appliquer les recommandations du Rapport Dean, une exception se fait remarquer : les modifications ne prĂ©voient pas de disposition pour l’application de pĂ©nalitĂ©s administratives pĂ©cuniaires (« PAP Â») comme outil d’exĂ©cution forcĂ©e lorsqu’un employeur contrevient Ă  la LSST. Le Rapport Dean recommandait que des PAP soient appliquĂ©es [Traduction] « principalement pour les infractions intentionnelles ou les rĂ©cidives qui font courir aux travailleurs des risques graves immĂ©diats Â». Il est intĂ©ressant de souligner que des versions antĂ©rieures du projet de loi 160 confĂ©raient au Ministre le pouvoir d’introduire des politiques Ă©crites sur l’interprĂ©tation et l’exĂ©cution de la LSST. On supposait que des PAP seraient peut-ĂŞtre introduites Ă  l’aide de ce mĂ©canisme. Toutefois, ce pouvoir ministĂ©riel a Ă©tĂ© supprimĂ© dans la version la plus rĂ©cente du projet de loi 160, et il semble que les PAP ne feront pas partie du nouveau rĂ©gime de santĂ© et sĂ©curitĂ© lancĂ© par le projet de loi 160.

Si vous voulez davantage d’information, veuillez communiquer avec Sébastien Huard au 613?940?2744.

Related Articles

Temps allouĂ© pour aller voter : obligation de l’employeur le jour du scrutin

L’élection fédérale aura lieu le lundi 28 avril 2025. Les employeurs doivent savoir qu’ils peuvent avoir l’obligation d’accorder une période…

Un arbitre des différends a refusé de déroger à un accord de principe non ratifié en l’absence de circonstances exceptionnelles et contraignantes

La décision rendue concernant l’affaire Syndicat des travailleurs canadiens des aéroports (STCA) c. GardaWorld Security Screening Inc., 2024 CanLII 92092…

La Cour supérieure de l’Ontario maintient une disposition relative au congédiement relevant uniquement de la LNE

Dans la dĂ©cision Bertsch v. Datastealth Inc., 2024 ONSC 5593, la Cour supĂ©rieure de l’Ontario a conclu qu’une disposition relative au congĂ©diement limitant…