Congédiement injuste au sens du Code canadien du travail – L’arbitre déclare que « la réparation par défaut doit être la réintégration »

Dans la récente décision Maninderpal Randhawa and The Bank of Nova Scotia (février 2017) rendue en vertu de la partie III du Code canadien du travail (le « Code »), l’arbitre Slotnick était d’avis que la réintégration était la réparation appropriée après avoir conclu que le congédiement de l’employée était injuste. La décision suit les principes énoncés par la Cour suprême du Canada dans Wilson c. Énergie Atomique du Canada Ltée (2016).

Les lecteurs d’Au Point se souviendront peut-être que, dans l’arrêt Wilson, la Cour suprême a indiqué clairement que les dispositions relatives au congédiement injuste de la partie III du Code procurent aux employés non dirigeants et non syndiqués la même protection contre le congédiement sans motif que celle dont bénéficient les employés syndiqués. Cela signifie que, sous réserve des exceptions précisées dans le Code, les employeurs de réglementation fédérale doivent démontrer que le congédiement est justifié.

Dans Randhawa, l’employée était une superviseure du service à la clientèle au moment de son congédiement en octobre 2014. Elle a commencé à travailler pour la banque en 1998, et elle n’avait aucun dossier disciplinaire et ses évaluations de rendement étaient positives, jusqu’aux mois précédant son congédiement. À la suite d’une vérification de sa succursale à l’été 2014, le gestionnaire de Mme Randhawa a relevé plusieurs problèmes liés à la supervision des représentants du service à la clientèle (caissiers) par Mme Randhawa. Il y a eu plusieurs réunions et échanges par courriels entre les gestionnaires de la succursale et Mme Randhawa, à la suite desquels la banque a mis fin à son emploi en raison du mauvais rendement de Mme Randhawa et de son manque de sincérité dans son refus de reconnaître ses problèmes de rendement. Mme Randhawa a déposé une plainte en vertu du Code, alléguant qu’elle avait été injustement congédiée et sollicitant la réintégration.

L’arbitre a souligné qu’au moment de la cessation d’emploi, Mme Randhawa n’avait jamais fait l’objet de mesures disciplinaires et avait constamment obtenu des notes de « qualité » à ses évaluations de rendement depuis sa promotion au poste de superviseure du service à la clientèle. De plus, elle n’avait jamais fait l’objet d’un plan de gestion du rendement. L’arbitre a appliqué la décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans Payne c. Banque de Montréal (2014), déclarant ce qui suit :

[TRADUCTION]
Le congédiement en l’absence de mesures disciplinaires antérieures, particulièrement pour une employée ayant de longs états de service comme Mme Randhawa, doit être réservé aux situations flagrantes où un seul incident a rompu le lien d’emploi au point où il ne peut être rétabli.

L’arbitre a conclu que même s’il y a peut-être eu des problèmes de rendement justifiant des mesures disciplinaires, [TRADUCTION] « il était injustifié pour la banque de passer directement au congédiement ». L’arbitre a notamment souligné l’absence d’indication à Mme Randhawa que son emploi était en péril. [TRADUCTION] « Même s’il y a eu de nombreuses discussions, il n’y a pas eu de mesures disciplinaires ni d’avertissements selon lesquels Mme Randhawa pouvait être congédiée en l’absence d’amélioration. »

Ayant conclu que Mme Randhawa avait été injustement congédiée, l’arbitre Slotnick est ensuite passé à la réparation qu’il convenait d’accorder. Il a déclaré ce qui suit :

[TRADUCTION]
À mon avis, lorsqu’une plainte pour congédiement injuste en vertu du Code canadien du travail est accueillie, la réparation par défaut doit être la réintégration, comme c’est le cas pour les employés syndiqués visés par une convention collective. C’est ce qui ressort clairement de l’analyse effectuée par la Cour suprême dans l’arrêt Wilson c. Énergie Atomique, dans lequel la Cour a convenu que les dispositions relatives au congédiement injuste visaient à conférer aux employés non dirigeants et non syndiqués dans les milieux de travail de réglementation fédérale « des protections généreuses très semblables à celles dont jouissent les employés protégés par une convention collective ».

L’arbitre a ensuite ordonné à la banque de réintégrer Mme Randhawa au poste de représentante du service à la clientèle (le poste de superviseur du service à la clientèle ayant été éliminé par la banque) et de verser à Mme Randhawa la valeur complète des salaires et avantages sociaux qu’elle aurait gagnés à titre de superviseure du service à la clientèle entre le moment de son congédiement et le moment de sa réintégration, sous réserve d’une suspension sans solde d’une semaine. L’arbitre a aussi ordonné à la banque de payer les frais juridiques de Mme Randhawa sur une base d’indemnisation substantielle.

 

À notre avis

Cette décision est importante pour les employeurs de réglementation fédérale. Elle indique clairement que les employés non dirigeants et non syndiqués ayant douze mois de service ou plus ne peuvent pas être congédiés sans motif valable. Et s’ils le sont, la réparation qui sera accordée sera vraisemblablement la réintégration sauf si le lien d’emploi est considéré ne plus être viable. En outre, lorsque des employés ont des problèmes de rendement, les employeurs doivent gérer leur rendement et appliquer des mesures disciplinaires progressives avant de mettre fin à leur emploi.

Si vous voulez davantage d’information, veuillez communiquer avec Sébastien Huard au 613-940-2744.

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