Le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario rejette l’allégation de discrimination présentée par une élève à besoins particuliers

La Loi sur l’éducation de l’Ontario (la « Loi ») reconnaît que les élèves en difficulté ne bénéficieront pas de services d’éducation égaux sauf si des accommodements appropriés sont faits. La Loi exige des conseils scolaires qu’ils accommodent chaque élève en prévoyant des programmes d’éducation de l’enfance en difficulté visant l’identification et le placement des élèves en difficulté. Récemment, le Tribunal des droits de la personne de l’Ontario a décidé que le Ottawa Catholic School Board (le « Conseil scolaire ») n’avait pas fait de la discrimination contre une élève.

Dans E.P. c. Ottawa Catholic School Board (avril 2011), le Tribunal a rejeté la requête au motif que le Conseil scolaire avait mis en place des accommodements appropriés. Paul Marshall, de Emond Harnden, a eu gain de cause au nom du Conseil scolaire à l’audience devant le Tribunal.

La requérante E.P., élève de niveau élémentaire qui commençait la 4e année au moment pertinent, a fait l’objet de diagnostics de perte légère de l’audition de conduction, d’acouphène et de trouble de traitement auditif central (TTAC), ce qui engendrait les difficultés suivantes : l’attention sélective, la fermeture du conduit auditif et la mémoire auditive à court terme. En 2006, une évaluation psycho-éducationelle faite par un psychologue dont les services avaient été retenus par la famille d’E.P. a indiqué qu’E.P. avait un trouble d’apprentissage, mais aussi qu’elle obtenait dans un domaine des notes la situant parmi les élèves doués. Selon les critères appliqués par le Conseil scolaire pour qu’un élève soit considéré comme doué, il faut une note se situant dans le 96e centile en compréhension verbale et une note se situant dans le 93e centile en raisonnement perceptif. E.P. a atteint cette note pour le raisonnement perceptif, mais non pas pour la compréhension verbale. Le Conseil scolaire a reconnu que la note de la requérante en compréhension verbale avait peut-être été influencée par son trouble d’apprentissage. Le Conseil scolaire a donc écarté cette note et a considéré la requérante comme douée.

Un Comité d’identification, de placement et de réexamen (« CIPR ») a été constitué en juin 2006. On a considéré que la requérante avait plusieurs atypies. Elle était considérée à la fois comme souffrant d’un trouble d’apprentissage et comme étant douée. Le CIPR a recommandé le placement de la requérante dans une classe régulière, avec retrait. L’aide par retrait signifiait que la requérante serait retirée de la classe régulière pour passer une journée par semaine dans le cadre du programme pour enfants doués à une autre école.

Lorsque la requérante a commencé la 4e année à l’automne 2006, le directeur adjoint de l’école et la mère de la requérante se sont consultés afin d’élaborer un plan d’enseignement individualisé (PEI) pour la requérante. De nombreux accommodements ont été apportés et la majorité sont demeurés les mêmes pour la 5e année.

En 2007, la mère de la requérante a déposé auprès de la Commission ontarienne des droits de la personne une plainte alléguant que le Conseil scolaire n’avait pas accommodé de façon appropriée E.P. en 4e et 5e années. La question dont était saisi le Tribunal consistait à savoir si la requérante avait bénéficié d’accommodements appropriés.

DEVANT LE TRIBUNAL DES DROITS DE LA PERSONNE

Le Tribunal s’est fondé sur sa propre décision dans Schafer c. Toronto District School Board (2010) pour formuler la portée de son enquête (voir : « Le Tribunal des droits de la personne statue qu’il n’est pas une instance d’appel des décisions du Tribunal de l’enfance en difficulté »). Les lecteurs d’Au Point se rappelleront de la décision Schafer, où le Tribunal a déclaré fermement qu’il ne lui appartient pas de veiller au respect de la Loi sur l’éducation, mais qu’il doit plutôt déterminer s’il y a discrimination sous le régime du Code des droits de la personne :

[Traduction]
Toutefois, il n’appartient pas au Tribunal de superviser la mise en œuvre de la Loi sur l’éducation. Il ne revient pas au Tribunal de déterminer si un conseil scolaire respecte strictement les procédures de constitution d’un CIPR ou de préparation d’un PEI. Tant que des mesures sont prises pour évaluer les besoins de l’enfant et préparer l’accommodement, la norme procédurale de l’obligation d’accommodement sera généralement respectée.

De même, tant que les accommodements de fond recommandés par le CIPR ou dans un PEI sont mis en œuvre de façon générale, la norme substantielle de l’obligation d’accommodement sera respectée. Il ne s’agit pas de savoir si les accommodements mis en œuvre correspondent à ce que voulait l’élève ou le parent, s’il s’agissait d’accommodements idéaux ou si d’autres accommodements auraient été tout aussi appropriés. La question qui se pose est simplement la suivante : le conseil scolaire a‑t‑il mis en œuvre des accommodements (de façon générale, mais pas nécessairement les accommodements recommandés par le CIPR ou dans un PEI) qui répondent aux besoins particuliers de l’enfant?

Ayant établi la portée de sa compétence, le Tribunal a ensuite examiné les arguments de la requérante. Selon la requérante, le Conseil scolaire n’a pas respecté son obligation d’accommoder ses besoins particuliers, et ce, de plusieurs façons, notamment en omettant :

  • de prévoir un plus faible coefficient élèves-enseignant dans la classe;
  • de fournir un aide-enseignant ou un éducateur;
  • d’évaluer fréquemment la requérante;
  • de fournir un enseignant qualifié pour l’éducation des élèves en difficulté;
  • de prévoir un programme adéquat pour élèves doués.

Une bonne partie de la preuve de la requérante était fondée sur le témoignage de sa mère. Ce témoignage contredisait souvent directement le témoignage des enseignants et des directions d’école du Conseil scolaire. Lorsqu’il a évalué la crédibilité des divers témoins, le Tribunal a déclaré ce qui suit :

[Traduction]
La requérante, l’enfant, n’a pas témoigné, ce qui est parfaitement compréhensible. La mère de la requérante n’était pas dans la classe et ne pouvait pas voir la mise en œuvre des accommodements, de sorte que les déclarations que j’ai entendues au sujet de la présumée omission étaient nécessairement de seconde main… fondées sur des discussions qu’elle avait eues avec sa fille. Ce témoignage est nécessairement moins fiable que le témoignage direct des enseignants.

Je préfère le témoignage direct des enseignants. Leur témoignage était simple. Ils étaient naturellement poussés par leur intérêt personnel à défendre la qualité de leurs actes, mais ils n’ont pas été désignés comme intimés, ce qui amoindrit leur intérêt. Par ailleurs, la mère de la requérante était déterminée à démontrer l’insuffisance des efforts du Conseil scolaire. Je préfère le témoignage des enseignants et des directions…

Le Tribunal a reconnu ne pas avoir entendu le témoignage de tous les enseignants qui ont enseigné à la requérante en 4e et 5e années. Toutefois, les enseignants qui ont témoigné avaient tous examiné le Dossier scolaire de l’Ontario et le PEI de l’année antérieure de la requérante. Les enseignants n’avaient peut-être pas de formation spéciale à l’égard de la combinaison particulière des besoins de la requérante, mais le Tribunal estimait qu’ils comprenaient et étaient en mesure de mettre en œuvre les accommodements prévus dans le PEI.

Le Tribunal a aussi rejeté l’affirmation de la requérante selon laquelle le Conseil scolaire ne l’a pas accommodée en ne lui fournissant pas une classe de plus petite taille et un aide-enseignant. Le Tribunal a souligné qu’il s’agissait de recommandations formulées par un psychologue privé et qu’elles ne faisaient pas partie du PEI de la requérante. De plus, une consultante en éducation de l’enfance en difficulté a témoigné qu’elle [Traduction] « n’avait jamais vu d’évaluation psychologique ne recommandant pas une classe plus petite et un aide-enseignant ».

Le Tribunal a conclu que cela indiquait que la recommandation ne manifestait pas [Traduction] « la reconnaissance de la réalité des budgets des conseils scolaires ». Le Tribunal s’est exprimé ainsi :

[Traduction]
À mon avis, cette recommandation, selon laquelle une enfant à profil d’enfant douée, souffrant d’un trouble d’apprentissage et atteignant constamment les normes provinciales avait besoin d’un aide-enseignant, ne reconnaît pas la situation concrète de l’éducation publique. J’estime que les besoins d’apprentissage de la requérante ne nécessitaient pas une classe plus petite ou un aide-enseignant. Cela ne signifie pas que cette enfant, ou tout enfant, ne bénéficierait pas de ces recommandations. Toutefois, leur mise en œuvre n’est pas nécessaire pour lui permettre de comprendre le programme. Je souligne que le PEI ne mentionnait pas la nécessité d’un aide-enseignant.

Le Tribunal a conclu que les enseignants et le Conseil scolaire avaient généralement mis en œuvre les accommodements figurant dans le PEI de la requérante. Il a rejeté la requête.

À notre avis

Cette décision est conforme à la décision qu’a rendue le Tribunal dans Schafer et à laquelle nous avons fait référence. La preuve démontrait clairement que le Conseil scolaire a pris des mesures pour évaluer les besoins de la requérante et préparé des accommodements appropriés. Cela respectait la norme procédurale de l’obligation d’accommodement. De même, le PEI prévoyant les divers accommodements a généralement été mis en œuvre, ce qui a satisfait à l’obligation substantielle du Conseil scolaire d’accommoder les besoins particuliers de la requérante. N’était pas pertinent pour la question de savoir s’il y a eu discrimination contraire au Code le fait que les accommodements ne correspondaient pas à ceux que la mère de la requérante préférait peut-être.

Si vous voulez davantage d’information, veuillez communiquer avec Paul Marshall au 613‑940‑2754.

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